Trois jeunes filles jugées pour l'incendie qui avait fait 18 morts à l'Haye-les-Roses
Le procès de trois jeunes filles accusées de l'incendie criminel d'une tour en septembre 2005 à L'Hay-les-Roses (Val-de-Marne), qui avait fait 18 morts victimes d'intoxication par la fumée, s'ouvre ce mardi devant la cour d'assises des mineurs du Val-de-Marne.
Prévu jusqu'au 19 décembre, ce procès, avec en toile de fond des querelles d'adolescentes, devrait se tenir à huis clos. Les accusées, âgées aujourd'hui de 19 à 21 ans, sont poursuivies notamment pour "destruction volontaire par incendie ayant entraîné la mort".
Une quatrième jeune fille, âgée de 15 ans au moment de l'incendie, comparaîtra ultérieurement devant le tribunal pour enfants.
Dans la nuit du 3 au 4 septembre 2005, un incendie s'était déclaré dans le hall d'une tour de 18 étages, propriété du bailleur social Immobilière 3 F, à L'Hay-les-Roses, au niveau des boîtes aux lettres. Le feu, rapidement maîtrisé, avait ravagé le hall, sans s'étendre aux étages mais une épaisse fumée toxique s'était propagée dans l'immeuble.
Douze personnes avaient été retrouvées mortes dans la cage d'escalier, victimes d'une intoxication par les fumées. Six autres, également intoxiquées, étaient décédées à l'hôpital les jours suivants, portant le bilan à 18 morts, dont trois enfants, et 28 blessés.
A l'époque, les pompiers avaient expliqué qu'il n'y avait "pas de raison" que le bilan de ce feu éteint avec "une seule lance" soit "aussi lourd" et rappelé qu'en cas d'incendie dans un immeuble, il fallait se calfeutrer chez soi.
Grâce à des témoignages, l'enquête sur ce feu d'origine criminelle s'orientait rapidement vers quatre jeunes filles, dont l'une habitait dans la tour. Elles avouaient avoir mis le feu à la boîte aux lettres d'une adolescente, résidant aussi dans la tour, avec laquelle elles ne s'entendaient plus. La veille déjà, deux d'entre elles avaient fait une première tentative.
Au-delà de la responsabilité de ces adolescentes apparemment dépassées par les événements, toutes dépourvues de casier judiciaire, l'instruction s'est attachée à comprendre comment la fumée s'était ainsi propagée dans l'immeuble.
Des expertises, contestées par l'Immobilière 3 F, ont relevé plusieurs non-conformités de l'immeuble aux règles sécurité incendie, avec la présence de matériaux inflammables dans le hall (boîtes aux lettres, lambris vernissés) et une ventilation en haut de la cage d'ascenseur insuffisante pour évacuer des fumées toxiques.
Selon les experts, la propagation du feu, jusque dans un ascenseur resté ouvert, a été favorisée par les matériaux inflammables. Quant à la fumée, elle s'est répandue via la cage d'ascenseur, l'escalier et les gaines de ventilation. Pour établir toutes les responsabilités, le parquet de Créteil a ouvert en août 2007 une nouvelle information judiciaire contre X, toujours en cours, pour "homicide involontaire par manquement à une obligation de sécurité ou de prudence".
Favorable à un procès public, Me Jean-Yves Liénard, avocat d'une accusée, estime qu'il aurait été "utile" que cette information soit "bouclée" avant le procès. Pour lui, "cette histoire" - dont sa cliente ne pouvait imaginer "le centième des conséquences" - devrait, avec la publicité des débats, "servir d'exemple pour ceux qui ne respectent pas les normes".
Attachée à ne "pas minimiser les responsabilités d'où qu'elles soient", Me Yolaine Bancarel-Lancien demandera le maintien du huis clos en raison notamment de "l'extrême fragilité" de la jeune fille qu'elle défend. Pour soutenir les victimes - 67 parties civiles se sont déjà constituées -, une cellule psychologique oeuvrera pendant tout le procès.